TW transphobie, essentialisme, …
Purée mais @Psychologies_ c'est le pire magazine wow pic.twitter.com/24s3ioTaAE— EmiLady (@EmiLady_) July 7, 2019
Le 7 juillet dernier, un tweet particulier lance un débat virulent, la psychanalyste Claude Halmos répond à la question d’une jeune fille de 6 ans : “Je veux devenir un garçon. Pourquoi ce n’est pas possible ?”
La professionnelle répond alors que c’est impossible, que l’on est naît dans un corps au sexe déterminé et qu’il n’est pas possible d’en changer.
En effet, la différenciation sexuelle chez les mammifères opèrent très rapidement dans le développement grâce à la présence du chromosome Y porteur du gène SRY qui est déterminant pour la formation des testicules où est produite la testostérone notamment (mais pas que), va permettre le développement de l’appareil génital et plus tard des caractères sexuels secondaires. En absence du chromosome Y, il y a également absence de SRY, ainsi les gonades se différencient en ovaires où est produit l’œstrogène notamment, donnant plus tard les caractères sexuels secondaires féminins.
Les “zététiciens” de la Tronche en Biais trouvent alors la réponse “navrante”, naturellement les réactions ne se font pas attendre, l’auteur du tweet affirme alors:
“Je ne sais pas ce qu’est un « garçon », je n’ai donc pas d’objection pour que cette jeune fille en devienne un. Si vous affirmez que cela est impossible, expliquez-moi.”
C’est ici que nous avons un problème : La tronche en biais ne semble pas connaître les méthodes scientifiques et statistiques de base en biologie : en effet, un internaute lui répond que la possession d’un chromosome Y est nécessaire pour être un garçon.
Le contre argument du zététicien est le suivant : Des anomalies génétiques peuvent apparaître dans certains cas, des individus aux chromosomes XY expriment un phénotype féminin. Ainsi la possession du Y ne serait pas un critère suffisant pour être un garçon.
La tronche en biais fait référence au syndrome de Swyer qui touche un individu sur 20 000 (0.005% de la population générale) et qui malheureusement rend les individus stériles, mais a t-il raison dans sa méthodologie ? Ce contre exemple est-il suffisant pour invalider le modèle selon lequel un mâle est définit par ses chromosomes ?
La biologie n’est pas une science absolue (comme la physique ou les mathématiques), la vie organique n’est jamais binaire :
Imaginons une colonie cellulaire homogène dans une boîte de culture, il n’y a qu’un seul et même type cellulaire dans cette boite. Je décide alors de verser un produit toxique extrêmement dangereux sur ces cellules, sur mes 100 000 cellules, seules 2000 survivent.
Quelle conclusion dois-je faire sachant que 98% des cellules sont mortes dans la boîte ? Que le produit n’est pas forcément dangereux puisque 2% des cellules ont survécus ?
En biologie nous avons rapidement mis en place un seuil qui fait consensus au sein de la communauté scientifique afin de pouvoir réaliser des conclusions : Nous posons une hypothèse, et on utilise les statistiques sur nos effectifs (ici le nombre de cellules mortes et vivantes), avec le test adapté on peut alors rejeter ou non l’hypothèse (par exemple: « le produit utilisé sur les cellules n’est pas dangereux, dans ce cas il y aura autant de cellules vivantes et mortes avant et après utilisation du produit » ou alors « Le produit utilisé est dangereux, il y aura donc statistiquement moins de cellules vivantes et plus de cellules mortes après utilisation du produit »).
Ainsi nous pouvons faire des conclusions d’une science qui n’est pas absolue.
Vous comprenez alors que si 99.995% des individus à phénotype mâle sont porteurs des chromosomes XY, alors on peut conclure qu’un mâle est caractérisé par ses chromosomes (qui sont à l’origine de tout le reste de la différentiation sexuelle) et le contre exemple énoncé par la Tronche en biais n’est en rien un argument invalidant. C’est une méthodologie facile à comprendre, efficace, qui est enseigné à la faculté de biologie dès la licence.
Je tente alors de lui expliquer, cela dit il faut assumer ses erreurs: je fais un grossier raccourcis en disant « si plus de 19 fois sur 20, un individu a un phénotype masculin est XY, alors on peut définir les mâles à partir de ces chromosomes », il faudrait bien entendu réaliser un test statistique, néanmoins la conclusion serait la même:
C'est des cas pathologiques (stériles) qui touchent un individu sur 20000. En biologie on accepte moins de 5% d'erreurs, donc si plus de 19fois sur 20, un individu qui a un phénotype masculin est XY, alors on peut définir les mâles à partir de ces chomosomes. pic.twitter.com/JkPxBY3lwv
— Anthony Cobalt (@CobaltAnthony) July 9, 2019
Je ne peux pas affirmer s’il ignore les méthodes de biostatistiques les plus élémentaires ou si l’idéologie l’emporte sur la méthode scientifique :
Le seuil 5% c'est magique, comment ça se passe ?
S'il y a moins de 5% d'homos ou de roux, on les exclus de la définition des humains ?
C'est merdique comme méthode, non ?— La Tronche en Biais (@TroncheBiais) July 9, 2019
Il est alors en roue libre :
Une anomalie génétique qui rend stériles, augmente drastiquement les risques de cancer au niveau des gonades sous développées, est de la diversité génétique à ses yeux, peut-on appliquer ce principe à toutes les pathologies génétiques ?
Je tente vainement une dernière fois de lui expliquer que la stérilité n’est pas un état normal ni enviable pour quiconque souhaite avoir le choix de se reproduire :
Je vous laisse juger de l’échange, mais je crois que ce “vulgarisateur scientifique” confond tous les sujets, de l’homosexualité à la stérilité, aucun rapport n’existe.
Finissons cet échange avec le bouquet final : dans un lointain souvenir de l’université, je croyais me
souvenir qu’il n’existait que deux sexes chez toutes les espèces réalisant la reproduction sexuée, j’ai donc été prudent et modeste dans mon message, la réponse fut beaucoup moins modeste :
Non content d’affirmer avec assurance des informations fausses (ce qui est stupide quand on est sur un réseau social, n’importe qui peut vérifier l’information en quelques secondes avec une recherche google ou sur pubmed), La Tronche en Biais ne souhaite pas avouer son erreur. Il fait alors la chose la moins scientifique qu’il m’a été permis de voir chez un vulgarisateur scientifique, prendre pour source un site de discussion comme s’il s’agissait d’un journal scientifique avec des articles jugés et corrigés par des chercheurs (“peer review journal”). Les zététiciens et vulgarisateurs font le lien entre les scientifiques et la masse, la base de ce travail est de sourcer les informations (avec des sources les plus solides possibles) afin que la masse puisse vérifier les différentes affirmations.
Pour finir, concernant la question de l’identité du genre de la petite Lucie, le chercheur Franck Ramus répond avec intelligence à la polémique.
Sur la question biologique : Peut-on changer de sexe ?
D’un point de vue génétique c’est impossible, il n’existe absolument aucune thérapie génique pour passer d’une paire de chromosomes XX à XY ou inversement, et cela ne servirait à rien car la différentiation sexuelle serait déjà effectuée.
On peut modifier le phénotype grâce à la chirurgie et à l’utilisation d’hormones, mais les individus deviennent stériles. Un XY devenu femme, n’aura pas d’utérus, ni d’ovaires, ni d’ovules. Une XX devenue homme, n’aura pas de testicules fonctionnels produisant des spermatozoïdes.
Le cercle cobalt est en accord avec la méthode scientifique et le travail zététique comme la critique de l’homéopathie ou l’opposition au rejet de la science pour cause idéologique.
Ici nous avons un exemple concret de zététicien aveuglé idéologiquement au point d’en oublier les fondamentaux (qu’est ce qu’une pathologie par exemple).
Bien-sûr, nous pouvons tous nous tromper et c’est pour cela qu’il est impératif d’être capable de débattre et argumenter sans attaque ad persona ou hominem. La meilleure chose que l’on puisse faire est de montrer l’exemple du bon usage de la raison critique et de la méthodologie scientifique.
Références :
https://rarediseases.org/rare-diseases/swyer-syndrome/
http://www.chups.jussieu.fr/polys/biostats/poly/stats.pdf (page 74)
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